Pessah, célébrée durant 7 jours (8 jours pour les juifs non-réformés en diaspora) à compter du 15 Nissan, commémore l'exode des Hébreux hors d'Égypte. Cette fête marque la « naissance » des enfants d'Israël. En effet, les Hébreux, ancêtres des Juifs, ayant été libérés du joug pharaonique sont désormais libres de suivre les voies et prescriptions de Dieu.

Avec Souccoth et Shavouoth, Pessah est l'une des trois fêtes de pèlerinage durant lesquelles tout le peuple devait effectuer un pélerinage à Jérusalem, au temps où le Temple était debout.

Plusieurs noms pour une fête

Hag ha-Pessah, la fête de la Pâque :

"C'est le sacrifice de la pâque en l'honneur de l'Éternel, qui épargna les demeures des Israélites en Egypte, alors qu'il frappa les Égyptiens et voulut préserver nos familles…"   Exode 12,27

Hag ha-matzoth, la fête des azymes :

"Sept jours durant, vous mangerez des pains azymes; surtout, le jour précédent, vous ferez disparaître le levain de vos maisons. Car celui-là serait retranché d'Israël, qui mangerait du pain levé, depuis le premier jour jusqu'au septième." Exode 12,15

Zeman hérouténou :

Expression liturgique figurant dans maintes prières et bénédictions de la fête de Pessah qui signifie « époque de notre libération » de la servitude égyptienne : "Qu’on se souvienne de ce jour où vous êtes sortis de l’Egypte, de la maison de servitude." Exode 13,3

Hag ha-aviv, la fête du printemps :

Pessah est la première fête qui suit le solstice du printemps et Nissan, premier mois de l’année juive selon la Torah, correspond au renouveau de la nature : "C’est aujourd’hui que vous partez, dans le mois de la germination " (Exode 13, 4)

Plusieurs symboles

Un repas spécial appelé Seder est célébré les deux premiers soirs de la fête (ou seulement le premier soir en Israël). Le Seder est une succession d'étapes mêlant bénédictions, alimentation, récits et chants. Les traditions peuvent varier selon les coutumes de chacun, mais le Seder s'organise globalement autour des mêmes symboles et selon le même programme :

·      un os d’agneau pour rappeler le sacrifice demandé aux Hébreux avant leur libération : "Parlez à toute la communauté d'Israël en ces termes: au dixième jour de ce mois, que chacun se procure un agneau pour sa famille paternelle, un agneau par maison."(Exode 12:3)

·      des herbes amères qui rappellent l'âpreté de l'esclavage en Égypte

·      de l’eau salée, symbole des larmes versées par les Hébreux pendant les souffrances de l’esclavage

·      un oeuf en souvenir du Temple détruit

·      l’harosset, un mélange de pomme, de cannelle et de vin qui représente le mortier utilisé par les Hébreux au temps de l’esclavage

·      l’hazeret, le raifort, qui introduit entre deux morceaux de matzah, constituera le « sandwich de Hillel », car il faut manger ensemble les aliments qui rappellent la servitude et ceux qui évoquent la libération, car la liberté ne va pas sans le souvenir de la servitude

·      la matzah est le symbole de la hâte avec laquelle les Hébreux ont recouvré leur liberté. Sur le plateau du Seder, on met 3 matzoth qui représentent : lesCohen (les prêtres descendants d’Aaron), les Lévi : la tribu d’Israël (qui n’a pas de territoire puisque attachée au service du Temple)  et Israël (tout le reste du peuple juif)

·      quatre coupes de vin bues en étant accoudés sur le côté gauche «comme des hommes libres ». L’interprétation la plus courante des quatre coupes est une mise en parallèle avec les quatre expressions de la délivrance mentionnées dans Exode : Je vous ferai sortir…Je vous sauverai…Je vous délivrerai… Je vous prendrai pour peuple

Des coutumes différentes

Les Samaritains (en Eretz Israël) célèbrent les rituels de Pessah sur le mont Garizim qui domine Sichem (Naplouse). Encore de nos jours, l’abattage de l’agneau pascal est le point culminant de leur cérémonie.

Les Juifs de Hongrie décorent la table du Seder de bijoux d’or et d’argent pour rappeler les éléments en métal précieux que les Égyptiens ont donné aux Hébreux au moment où ils ont quitté l’Egypte.

En Afghanistan et chez des Juifs de Perse, pendant le chant des Dayenou, toutes les personnes autour de la table frappent (doucement) le dos de leurs voisins avec des oignons verts pour symboliser les fouets des exacteurs.

Les Juifs d’Ethiopie cessent de manger du levain trois jours avant la fête pour ne consommer que des pois et des haricots secs jusqu’à la veille de Pessah. Ensuite, ils jeûnent jusqu’à ce que leur grand prêtre sacrifie l’agneau sur un autel dans la cour de la synagogue. L’entrée du bâtiment est aspergée du sang de l’animal.

Dans le Caucase, les Juifs s’habillent de vêtements de « liberté » avec des manches amples et flottantes ; certains portent une dague ou même un pistolet à la ceinture. Ils mettent en scène un drame pour lequel l’un d’eux doit sortir, puis frapper à la porte, pour annoncer qu’il vient juste d’arriver de Jérusalem.  Tous les autres lui demandent alors des nouvelles de la Ville sainte et s’il apporte un message de libération et de rédemption.

Certaines communautés séfarades et orientales pratiquent elles aussi la mise en scène dramatique : le repas est mangé à la hâte, debout, les reins ceinturés, le bâton à la main, comme nos ancêtres avant leur sortie d’Egypte. Certains enveloppent l’afiqoman dans un tissu, le passent par-dessus l’épaule et quittent la pièce en disant « C’est ainsi que nos ancêtres quittèrent l’Egypte ».

Les Juifs clandestins d’Espagne et du Portugal, les Marranes, observaient la fête le 16 Nisan afin de détourner la suspicion portant sur le jour précédent. A cette date, ils cuisaient secrètement du pain non levé et tenaient un seder clandestin pendant lequel ils consommaient un mouton entier rôti, tout en portant des chaussures de voyage et en tenant un bâton à la main.

Les Marranes du Mexique enduisaient les montants de porte avec du sang d’agneau comme nos ancêtres et battaient les eaux d’un fleuve avec des branches de saule pour symboliser le passage de la mer Rouge.

Un vocabulaire spécifique

·  Haggadah : ce mot provient de la racine s-d-b qui a donné le verbe lehaguid (dire, raconter, déclarer). En hébreu moderne, Haggadah signifie « déclaration, affirmation » mais aussi « légende, conte, propos ». Plus précisément pour la fête de Pessah, il désigne le récit de la sortie d’Egypte que nous lisons pendant le seder

· Seder (ordre, série) : La racine r-s-x a a donné le verbe lesader (ordonner, arranger, disposer) ou encore siddour (manuel de prières). Un seder, au sens large, c’est donc un rituel organisé selon un ordre précis, et bien sûr, à pessah, il désigne notre fameux repas organisé en 14 étapes différentes.

· Hametz (pâte levée) : le mot vient de la racine m-n-j qui signifie « devenir acide, s’aigrir » et selon le processus biochimique de la fermentation « faire lever ».Du point de vue de la Halakhah, le hametz, c’est la pâte fermentée, et par extension, tout aliment à base des 5 céréales (blé, orge, avoine, seigle, épeautre) qui au contact de l’eau a fermenté pendant au moins 18 minutes. Sur le plan symbolique, le hametz évoque tout ce qui gonfle : l’aspect positif, civilisateur, qui nous fait sans cesse embellir les choses par ajouts successifs, mais aussi l’inflation de l'ego, un symbole d’orgueil, que la fête de Pessah nous demande justement de combattre pour revenir à plus d’humilité.

·  Hol hamoed : Ce terme désigne les jours non chômés compris entre les premiers et derniers jours de Pessah et de Souccoth.

Les préparatifs de Pessah

Le Shabbath Hagadol

"Le grand shabbath" est celui qui précède Pessah. On y lit la haftarah annonçant l'arrivée du prophète Elie, héraut de la Rédemption. La tradition veut en effet que le prophète Elie arrive pendant le mois de Nissan, c’est d’ailleurs pour lui qu’est servie la dernière coupe de vin du seder.

La recherche du Hametz

Avant que la fête ne commence, il faut rechercher et détruire toute nourriture à base de levure se trouvant dans la maison. Certains procèdent parfois à la « vente » de leur hametz pour s'en débarrasser le temps de la fête.

La veille de la fête au soir, on organise à la maison la recherche du hametz. Des miettes de pain enveloppées dans du papier sont parfois cachées pour les enfants. Le hametz trouvé est ensuite brûlé le lendemain matin et une bénédiction est alors prononcée, déclarant « poussière » tout le hametz n'ayant pas pu être débusqué.

Après Pessah : le Omer

Dès le deuxième jour de Pessah commence le compte de l’Omer qui s’arrêtera à Shavouoth. Omer qui signifie « gerbe », qui était l’offrande apportée au Temple le second jour de Pessah. Le Omer correspond à un dixième d’ephah (c’est-à-dire un peu plus de deux litres) et constitue par conséquent, une offrande relativement modeste. Il était interdit de manger du grain nouveau jusqu’à ce que le Omer fût apporté au prêtre dans le Temple.

Après la destruction du Temple et l’interruption de toutes les offrandes, la pratique de compter les jours entre Pessah et Shavouoth survécut sous la seule autorité rabbinique. Depuis la nuit du 16 Nissan jusqu’à la fin de la période de sept semaines, chaque jour est compté séparément, le décompte des jours et des semaines de la période du Omer étant chaque fois mentionné. Le comput est effectué de nuit, pendant l’office du soir. Si le comput du Omer trouve son origine dans la période biblique, diverses interprétations rabbiniques ont souligné l’importance de son application pour les Juifs après la destruction du Temple. Maïmonide explique que le comput quotidien des jours entre Pessah et Shavouoth exprime la hâte du peuple juif à célébrer la fête marquant l’anniversaire de la Révélation et du don de la Torah. Dans le même esprit, d’autres soulignent que la fête de la libération (Pessah) serait incomplète sans la fête du don du la Torah (Shavouoth), car la liberté sans la Loi peut être destructrice. L’Omer constitue ainsi le pont entre ces deux fêtes, reliant les idéaux de liberté et de loi.

Au fil du temps, les semaines de la période du Omer sont devenues synonymes de tristesse et de demi-deuil. Les raisons en sont obscures et ont donné lieu à de nombreuses discussions Ainsi, rapporte-t-on que cette période aurait coïncidé avec la révolte de Bar Kohba (132-135 de l'Ère chrétienne). Le Talmud stipule que pendant cette même période une épidémie aurait entraîné la mort de 24.000 des élèves de Rabbi Akiva. Au fil des siècles, les rabbins se sont efforcés de démontrer que nombre de malheurs survenus au Peuple juif ont débuté pendant l'Omer (Inquisition des juifs d'Espagne, soulèvement du Ghetto de Varsovie...) accentuant le sens du deuil. A l'instar du deuil dans le judaïsme, l'usage consiste, durant les 33 premiers jours de l'Omer, à respecter certaines traditions du deuil, et à s'abstenir de réjouissances. Ainsi, on essaye de différer un mariage.